Droit d'auteur : quid de l'exception pédagogique dans l'Éducation nationale ?

La question est souvent posée dans nos formations en droit d'auteur sur l'application de l'étrange exception dite pédagogique ayant été aménagée en France lors de la transposition de la directive Droits d'auteur et droits voisins dans la société de l'information (DADVSI) par la loi du 1er août 2006.

Il s'agit, dans le code de la propriété intellectuelle, de l'exception visée à l'article L.122-5, 3°, e, et qui dispose :

"La représentation ou la reproduction d'extraits d'œuvres, sous réserve des œuvres conçues à des fins pédagogiques et des partitions de musique, à des fins exclusives d'illustration dans le cadre de l'enseignement et de la recherche, y compris pour l'élaboration et la diffusion de sujets d'examens ou de concours organisés dans la prolongation des enseignements à l'exclusion de toute activité ludique ou récréative, dès lors que cette représentation ou cette reproduction est destinée, notamment au moyen d'un espace numérique de travail, à un public composé majoritairement d'élèves, d'étudiants, d'enseignants ou de chercheurs directement concernés par l'acte d'enseignement, de formation ou l'activité de recherche nécessitant cette représentation ou cette reproduction, qu'elle ne fait l'objet d'aucune publication ou diffusion à un tiers au public ainsi constitué, que l'utilisation de cette représentation ou cette reproduction ne donne lieu à aucune exploitation commerciale et qu'elle est compensée par une rémunération négociée sur une base forfaitaire sans préjudice de la cession du droit de reproduction par reprographie mentionnée à l'article L. 122-10"

Comme on le voit, cette formulation pour le moins absconse porte en elle des absurdités puisque par exemple, seuls les "extraits d'œuvres" sont licites : finie l'étude intégrale d'une poésie si elle n'est déjà dans un ouvrage scolaire, finie l'étude d'un article complet du Spiegel en cours d'allemand ; il faudra se contenter de morceaux.
Autre absurdité qui peut faire sourire : l'exception ne peut jouer que si elle est utilisée "à l'exclusion de toute activité ludique ou récréative". En d'autres termes, la pédagogie, ça doit forcément être ennuyeux et pesant, pour rester correct !

Face à ce fatras de détails plus ou moins cohérents, l'Éducation nationale a fort heureusement conclu, dès la publication de la loi, des accords avec le monde de l'édition qui permettent des utilisations un peu plus larges. Il convient donc de se référer à ces accords qui sont régulièrement renouvelés pour connaître le périmètre précis de l'exception dont peuvent bénéficier tous les établissements de l'Éducation nationale et de l'Enseignement supérieur puisque la conférence des présidents d'universités et partie prenante dans ces conventions.

Le dernier en date de ces accords est le suivant :
Protocole d'accord sur l'utilisation et la reproduction des livres, des œuvres musicales éditées, des publications périodiques et des œuvres des arts visuels à des fins d'illustration des activités d'enseignement et de recherche – NOR : MENE1600684X - protocole d'accord du 22-7-2016 – MENESR – DGESCO B1-1 – DGESCO B1-2 : publié au BOEN n°35 du 26 septembre 2016 :
http://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=106736

Le BO de l'Éducation nationale précise, dans une notice introductive, en quelques mots l'étendue de l'accord pour les personnes qui ne voudraient pas se plonger dans l'ensemble de ce texte hautement juridique.

Didier FROCHOT