Numérique et droits fondamentaux : rapport du Conseil d’État

Le 9 septembre dernier, le Conseil d’État publiait son rapport "Le numérique et les droits fondamentaux", étude annuelle sur ces questions.

Des enjeux en mutation

"Neutralité d’internet, gouvernance, « droit à l’oubli », propriété des données, exploitation et agrégation en méga-données, rôle inédit des plateformes… Les bouleversements suscités par le numérique dans les domaines économiques, technologiques et sociaux interrogent tout particulièrement les repères juridiques habituellement reconnus. S’ils ouvrent de nouveaux espaces de libertés, ils sont aussi porteurs de risques pour celles-ci."
"Dans quelle mesure la protection des droits fondamentaux nécessite-t-elle d’être repensée dans ce contexte nouveau ? C’est pour répondre à cette question centrale que le Conseil d’État, gardien des droits et libertés fondamentaux, consacre son étude annuelle 2014 au numérique et y formule 50 propositions. Celles-ci éclaireront utilement les exercices aujourd’hui engagés par les pouvoirs publics : au niveau national avec le projet de loi sur le numérique qui devrait être soumis au Parlement en 2015, et pour lequel une concertation préalable confiée au Conseil national du numérique doit débuter prochainement ; au niveau européen avec les règlements en cours de discussion sur la protection des données personnelles et sur le marché unique des communications électroniques."
Source : communiqué du Conseil d'État du 9 septembre

50 propositions

Ce rapport formule 50 propositions pour mettre le numérique au service des droits individuels et de l’intérêt général.

Dans la droite ligne de l’arrêt Google Spain de la CJUE

Parmi celles-ci, nous en signalerons tout particulièrement quelques-unes qui rejoignent les questions d’é-réputation  ainsi que celles de droit de l'internet :

"1 - Repenser les principes fondant la protection des droits fondamentaux (propositions 1 à 3) :

  • Renforcer la place de l’individu dans le droit à la protection de ses données (« autodétermination informationnelle ») pour lui permettre de décider de la communication et de l’utilisation de ses données à caractère personnel ;
    (…)
  • Créer une nouvelle catégorie juridique pour les « plateformes » (distincte à la fois des éditeurs et des hébergeurs) qui proposent des services de classement ou de référencement de contenus, biens ou services mis en ligne par des tiers ; les soumettre à une obligation de loyauté envers leurs utilisateurs (les non professionnels dans le cadre du droit de la consommation et les professionnels dans le cadre du droit de la concurrence).
    (…)


2 - Renforcer les pouvoirs des individus et de leurs groupements (propositions 4 à 11) :

  • (…)
  • Mettre en œuvre de manière efficace le droit au déréférencement (reconnu par la Cour de Justice de l’Union Européenne dans son arrêt Google Spain du 13 mai 2014) ;
    Définir les obligations des plateformes envers leurs utilisateurs qui découlent du principe de loyauté ; (…)"

Quelques observations.

Un concept juridique nouveau apparaît : "l'autodétermination informationnelle" dont il sera intéressant de suivre l'évolution puisqu'il recouvre certainement le fameux droit à l'oubli mais peut se révéler plus vaste.

La création envisagée d'une nouvelle catégorie d'opérateurs sur Internet, à mi-chemin entre l'hébergeur et l'éditeur de site, la plateforme n'est pas nouvelle mais mérite d'être remarquée sous la plume du Conseil d'État, conseiller juridique de l'État, rappelons-le. On pourrait donc voir poindre dans notre législation, voire au niveau européen un nouveau statut à ce sujet.

Poursuite de l’ouverture des données publiques encadrée

Sur le plan de l’ouverture des données certaines propositions retiennent également notre attention :

"4 - Assurer le respect des droits fondamentaux dans l’utilisation du numérique par les personnes publiques (propositions 32 à 42) :

  • Poursuivre l’ouverture des données publiques tout en prévenant les risques pour la vie privée ;
    (…)
  • En matière d’ouverture des données publiques, adopter une charte d’engagement et de bonnes pratiques signée par l’État, les associations de collectivités territoriales et les représentants des utilisateurs des données publiques, et définir des standards d’anonymisation afin de lutter contre les risques de réidentification."

Un 5ème axe concerne : "Organiser la coopération européenne et internationale (propositions 43 à 50)".

En savoir plus

Voir le communiqué complet du Conseil d’Etat sur son site :
www.conseil-etat.fr/node.php?articleid=3450
Télécharger le dossier de presse (45 pages ; pdf : 191 Ko) :
www.conseil-etat.fr/media/document/RAPPORT%20ETUDES/dossier-de-presse_etudenumerique.pdf
Télécharger le rapport complet sur le site de la Documentation française (446 pages ; pdf : 4.3 Mo) :
www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/144000541-etude-annuelle-2014-du-conseil-d-etat-le-numerique-et-les-droits-fondamentaux

Sur les questions de "plateformes" sur Internet voir notre actualité du 8 janvier 2008 : Web 2.0 — un concept émergent : gestionnaire de plateforme, et notre article de fond du 8 février 2010 : Quelles responsabilités pour les gestionnaires de plateformes Web 2.0 ?

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Didier FROCHOT