Droit d’auteur : plagiat et/ou contrefaçon ?

Un petit point de terminologie juridique…

On sait que le droit, plutôt que d’avoir forgé un jargon scientifique abscons comme de nombreuses autres sciences, utilise des termes du langage courant, leur réservant cependant un sens différent du sens courant. Il en est ainsi, en droit d’auteur, de la célèbre originalité de l’œuvre, que nous présentons régulièrement en formation comme un faux-ami, comme pour les langues étrangères. Et nous ne nous arrêterons pas sur les mauvaises plaisanteries que peuvent susciter "l’entrée en jouissance" du locataire dès lors qu’il occupe les lieux loués et le fait que le juge doit être "saisi par les parties"…

Pour en revenir au droit d’auteur, nous nous arrêterons sur le terme bien connu du grand public de plagiat. Terme que nous devons souvent préciser dans nos formations.

Définition du plagiat

Le terme est défini de manière très concise mais très précise par le Larousse en ligne : "Acte de quelqu'un qui, dans le domaine artistique ou littéraire, donne pour sien ce qu'il a pris à l'œuvre d'un autre". (www.larousse.fr/dictionnaires/francais/plagiat/61301).

Pour qu’il y ait plagiat, il faut mentir par omission, c’est-à-dire laisser croire qu’on est l’auteur d’une œuvre qu’on a en fait empruntée à un autre (d’où la remarquable concision de la définition Larousse : "quelqu'un qui donne pour sien ce qu'il a pris à l'œuvre d'un autre")
Ce peut être un "emprunt" total et servile (simple reproduction) ou accompagné de légères modifications, histoire de ne pas être repéré. Il faut savoir que dans un cas comme dans l’autre c’est fautif, dans le second plus encore, est régulièrement condamné par les tribunaux.

Plagiat ou contrefaçon ?

Le problème est que le terme plagiat ne se trouve nulle part dans le droit d’auteur français. Le droit d’auteur, et plus largement la propriété intellectuelle, ne connaît en France que la contrefaçon.

Définition de la contrefaçon

La contrefaçon est l’atteinte portée à l’un quelconque des droits conféré à un titulaire de droit de propriété intellectuelle, quel qu’il soit (droit d’auteur et droit voisin — artiste-interprète —, brevet, marque, dessin et modèle, obtention végétale…)

Périmètres respectifs des deux notions

Il s’ensuit que le plagiat est une des modalités de la contrefaçon. Ce dernier terme est plus vaste, même sur le seul terrain du droit d’auteur.
Ainsi, toutes les fois où l’on prend bien soin de citer l’auteur de l’œuvre qu’on copie, diffuse ou publie, en ligne ou autrement, il n’y a certes pas plagiat, mais la contrefaçon est flagrante dès l’instant que l’auteur n’a pas donné son accord pour qu’on exploite son œuvre. 
À moins qu’on ne soit :

  • Dans un des cas d’exception au monopole d’exploitation appartenant à l’auteur, notamment la courte citation ;
  • Dans le cas d’une œuvre publiée sous l’une des licences creative commons, lesquelles autorisent l’utilisation de l’œuvre sous la réserve d’y apposer le nom de l’auteur (les 6 licences CC homologuées dans le monde comportent cette obligation de mention de la  paternité de l’œuvre). 

À retenir

Le mot plagiat est un terme du langage courant qui n’a pas de valeur juridique en soi. Il désigne une des atteintes au droit d’auteur qui consiste à escamoter le nom du véritable auteur de l’œuvre, pour s’attribuer la paternité de celle-ci. Cette pratique est une de celles qui s’analyse en une contrefaçon, délit pénalement et civilement réprimé dans de nombreux systèmes juridiques au monde, notamment en France (article L.335-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle).

En savoir plus

Voir nos Fiches synthétiques sur le Droit d’auteur et le Schéma associé ;
Voir nos articles sur L'exception de courte citation et sur Les licences creative commons.

Didier FROCHOT