Les bulletins bibliographiques

Le droit applicable

Droit d'auteur : Livre 1er du code de la propriété intellectuelle
Jurisprudence Microfor / Le Monde - notamment l'arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation du 30 octobre 1987.

L'esprit du bulletin bibliographique

Un bulletin bibliographique a pour but d'informer sur les nouvelles publications, articles et éventuellement nouveaux ouvrages. Il constitue un signalement d'œuvres et en principe n'emprunte en rien à la partie protégée de celles-ci. Est-ce bien toujours le cas ?

Le bulletin bibliographique face au droit

Un bulletin peut être purement signalétique (références seules), analytique (indexation), voire informatif (résumés).

Le niveau signalétique

La Cour de cassation, par deux fois, a réaffirmé dans l'affaire citée que le signalement d'une référence était libre, quand bien même on reproduirait les titres de l'article et de la revue, protégés par le droit d'auteur. Leur mention dans un but signalétique est libre. Sinon, comment satisfaire à l'art. L.122-5 3° qui précise « sous réserve que soit indiqué clairement le nom de l'auteur et la source » ?

Le niveau indexation

L'indexation consiste à identifier les idées et thèmes abordés dans un article et à les étiqueter avec des mots propres ou sortant d'un langage documentaire. Or, les idées et les thèmes sont de libre circulation, seule leur mise en forme avec des mots appartient à l'auteur. L'indexation est donc libre, toujours selon la Cour.

La question des résumés

Celle-ci appelle plus de commentaires.

Reprise de résumés de la revue ou de l'auteur

Cette pratique revient à reproduire en totalité l'œuvre d'un auteur et suppose l'accord de celui-ci. À défaut, c'est illicite.

Résumés réalisés par voie de courtes citations

Pour donner une idée de l'article, il est possible de reprendre de courts extraits de celui-ci mis bout à bout. Dans la mesure où le sens de l'article n'est pas altéré, cette pratique constitue un agencement licite de courtes citations justifiées par leur présence dans une œuvre d'information : le bulletin bibliographique (solution Microfor, toujours).

Résumés conseillés dans la jurisprudence microfor

Dans son premier arrêt de cassation (1983), la Cour avait utilisé une périphrase qu'elle n'a pas confirmée dans son dernier arrêt, mais sur laquelle la doctrine s'est précipitée. Selon la cour, le résumé licite est celui qui ne devait pas dispenser le lecteur de recourir à la lecture de l'œuvre première. Ainsi était lancé ce qui allait devenir le critère de non substituabilité, poussé jusqu'aux plus hautes instances communautaires (qui s'en sont vite débarrassées, agacées par le byzantinisme des juristes français). Le bon résumé ne doit pas dispenser le lecteur de lire l'œuvre première. Mais quel lecteur sérieux se contentera du résumé d'un article ? Ou faut-il penser que l'article est si peu riche que le résumé suffise pour en rendre toute la substance ?
Sur cette question, outre les quelques lignes ci-dessous, cf. notre article sur le Statut juridique des résumés.

Actualité de la solution microfor

Par delà la polémique qui pourrait s'ouvrir sur le bien fondé d'une telle exigence, largement décalée par rapport à la pratique de la société de l'information, la question peut se poser de savoir si la solution serait toujours la même aujourd'hui.
L'arrêt final de 87 ne reprend en rien la formule de 83. La Cour semble éviter de retomber dans cet excès...
Les instances communautaires, favorables au développement des bases de données et à l'industrie de l'information ont toujours rejeté ce critère et ont tout fait pour l'évacuer du projet de directive sur les bases de données, ce qui fut fait. Qu'en est-il dans la pratique professionnelle ?

Quid des résumés informatifs ?

Selon la logique de la Cour, les résumés informatifs, qui dévoilent notamment les opinions émises par les auteurs, seraient illicites.

Et les résumés indicatifs ?

Les seuls résumés indicatifs, qui n'indiquent que les thèmes abordés de manière externe, seraient donc licites. Mais s'ils reprennent en détail les idées de l'auteur dans le même ordre que celui-ci, ils empruntent à l'auteur l'agencement de ses idées, protégé lui aussi par son droit d'auteur. Cas de conscience...

Vive le résumé synthétique !

Il reste donc à conseiller le résumé synthétique, par lequel les idées de l'article sont mentionnées selon un agencement différent de celui de l'auteur. Que de contorsions...

Ce qu'il faut retenir

Une fois de plus, constatons que le droit n'est plus adapté à la société de l'information. On le sait, certains éditeurs et groupes de pression voudraient interdire les résumés documentaires... Qu'attend la profession pour se mobiliser ?

|cc| Didier Frochot - 2004 - révision mars 2006

Voir aussi :

Fiche synthétique : Résumés documentaires - Article juridique : Statut juridique des résumés documentaires.

Didier FROCHOT