Pluralité d'auteurs – 2 : L'œuvre composite

Après nous être intéressé à l'œuvre de collaboration (notre actualité du 17 février dernier), nous nous penchons cette semaine sur la définition et le régime de l'œuvre dite composite.

Aux termes de l'article L.113-2 alinéa 2 du Code de la propriété intellectuelle, une œuvre composite suppose une "œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l'auteur de cette dernière".

Une œuvre "en plusieurs couches"

Il s'agit donc de l'œuvre réalisée par un auteur qui décide d'intégrer dans celle-ci, une œuvre déjà créée par un autre auteur, lequel n'intervient pas dans cette réalisation. C'est précisément ce qui oppose terme à terme l'œuvre de collaboration à l'œuvre composite. Dans le précédent cas, l'œuvre est coréalisée et les créations des coauteurs sont concomitantes. Dans l'hypothèse composite, il y a emprunt d'une œuvre déjà créée, préexistante.

Quelques cas de figure

On peut citer le cas d'un catalogue de vente intégrant des illustrations d'objets réalisées préalablement par des photographes. Le catalogue est l'œuvre composite, intégrant les œuvres des photographes des objets sans que ceux-ci interviennent effectivement dans la création du catalogue.
Il est aussi possible de viser une chanson qui est créée par un compositeur qui met en musique un poème déjà existant et qui a déjà vécu une vie autonome, tels certains poème d'Aragon ou de Prévert.
On peut encore citer les cas historiques de l'opéra Le Prince Igor de Borodine, achevé après la mort du compositeur par deux de ses élèves, Rimsky-Korsakov et Glazounov, ou encore de l'orchestration des Tableaux d'une exposition de Moussorgski par Maurice Ravel.

Le régime de l'œuvre composite

Logiquement, pour réaliser une œuvre composite, l'accord de l'auteur de l'œuvre préexistante est nécessaire, comme pour toute autre exploitation de cette œuvre (article L.113-4), sauf bien sûr si l'oeuvre est dans le domaine public. Le texte précise en effet "sans la collaboration de l'auteur" mais pas "sans l'accord". Il découle donc des principes de propriété de l'auteur sur son œuvre que toute exploitation de cette œuvre, notamment composite, suppose l'accord de son auteur.
Enfin, il semble tout aussi logique que l'œuvre composite tombe dans le domaine public au terme des 70 années suivant la mort de l'auteur de l'œuvre composite, sans exclure bien sûr les droits sur l'œuvre incorporée dans celle-ci pour le cas où elle serait, elle aussi, toujours protégée.

Nous évoquerons prochainement le cas de l'œuvre collective, dernier cas reconnu par le législateur, parmi les œuvres supposant une pluralité d'auteurs.

Didier FROCHOT