Pour une photothèque juridiquement bien gérée

En décembre 2011, nous avions proposé un de nos parcours pédagogique à propos du droit de l'image (notre actualité du 15 décembre 2011).
Nous proposons aujourd'hui un mini-article qui peut orienter bien des gestionnaires de photothèques et de collections iconographiques : Comment bien gérer une photothèque ? Mais surtout sous l'angle des exigences d'une saine gestion juridique des droits afférents aux images stockées. Il ne nous appartient pas ici de professer quelque connaissance technique et d'analyse documentaire de l'image fixe.

Des cordonniers souvent mal chaussés...

L’expérience a très souvent montré — pour ne pas dire dans la plupart des cas — que les photothèques, si bien gérées soient-elles sur le plan de la conservation et de la gestion technique des photographies et autres images, avec notamment leur indexation, etc., n’étaient absolument pas gérées dans le but d’une bonne exploitation juridique.

Des fonds photographiques plombés pour des décennies

Au bout du compte, nombreuses sont les collectivités ou les entreprises qui se retrouvent avec des fonds photographiques d’une exceptionnelle richesse, mais que les gestionnaires sont totalement incapables d'exploiter sans risques, faute d’avoir correctement géré les aspects juridiques, pour tout dire, faute d'avoir bien géré les droits attachés aux photos.

Nous esquissons donc ici une série de conseils de bonne gestion de photothèque. Même si pour le passé, il est souvent trop tard pour rattraper le coup, surtout si, dans la collectivité ou dans l’entreprise, on n’a jamais pris la peine de faire signer des contrats, ces quelques pistes pourront aider pour l’avenir à tenir un fonds avec plus de rigueur documentaire et juridique.

Une bonne gestion documentaire

Même si ce type de gestion n’entre pas dans les prescriptions juridiques proprement dites, la gestion documentaire d’un fond photographique est intrinsèquement liée à la gestion des droits, au point que nous devions évoquer quelques contraintes élémentaires.

Toute image stockée doit pouvoir être reliée à tout moment aux droits qui y sont attachés et qui en principe ont été cédés. Il importe donc de consigner dans la gestion documentaire d’une image :

  • Son auteur ;
  • Sa date de première publication (preuve de divulgation de l’œuvre) ;
  • Sa ou ses dates d’exploitation au sein de la collectivité ou de l’entreprise et les supports de cette ou de ces exploitations ;
  • Le renvoi au contrat de cession de droits d’exploitation signé par le photographe et stocké dans la partie juridique de l’outil de gestion ; s’il n’y a pas eu de contrat, renvoyer au moins à des échanges de courriers ou de courriels (voir gestion juridique ci-dessous) ;
  • L’éventuelle appartenance de l’image à un lot, géré par un même contrat et le renvoi à celui-ci comme ci-dessus ;
  • Les diverses versions de l’image, fournies par l’auteur (haute définition pour l’impression papier, basse définition pour le Web…)

Une bonne gestion juridique

À ces données de base attachées aux images, devront s’ajouter d’autres données permettant la gestion juridique de celles-ci :

  • L’état civil et les coordonnées les plus précises des auteurs dont des images sont présentes dans le fonds ;
  • Le cas échéant et dans la mesure où on l’apprend, la date du décès de l’auteur et si possible l’identité des héritiers, ou à tout le moins l’un d’eux ;
  • L’identité de l’éventuel représentant de l’auteur (agence photo, agent artistique…) ;
  • Les contrats passés avec chaque auteur, renvoyant précisément aux images stockées dans le fonds, soit à l’unité, soit par lot ;
  • Cette partie juridique de la base de données doit permettre à tout moment de savoir d’un seul coup d’œil :
    • Quels droits de l'auteur ont été cédés ou autorisés (reproduction, représentation, retouche, recadrage, floutage…) ;
    • Pour quelle durée ;
    • Sur quels supports et/ou dans quel périmètre intellectuel (exemple : « toutes opérations de promotion de la collectivité… ») ;
    • Formats ou définitions autorisés par l’auteur (notamment l’exploitation pour le Web en basse définition : fourniture de l’image basse définition par l’auteur, ou degré de compression autorisé) ;
  • L’existence d’autres droits incidents sur chaque image, ou sur un lot :
    • Personnes reconnaissables — si oui, résumé synthétique des droits cédés, sachant que les droits à l’image des  personnes sont strictement limités dans le temps, et si possible stockage de l’acte de cession lui-même ;
    • Bâtiments et/ou objets présents sur les images et susceptibles d’engager la question des droits du propriétaire ; le cas échéant résumé synthétique des accords obtenus et stockage de l’acte.

En savoir plus

Relire notre actualité du 15 décembre 2011, précitée, qui renvoie à nos fiches synthétiques et articles de fond sur ces questions, et notamment notre Fiche synthétique sur Le droit de l'image.

Didier FROCHOT